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La région Sud-PACA : pionnière en matière de transports

Philippe Tabarot,

vice-président de la Région Sud-Provence-Alpes-Côte-d’Azur,

délégué aux Transports.




Dans une région contrainte par la mer, la montagne et avec une forte fréquentation touristique, en situation habituelle, la Région Sud-Provence-Alpes-Côte-d’Azur a longtemps été pointée du doigt pour une qualité de service approximative pour ses transports. La Région a rétabli la situation. Aujourd’hui, elle fait même partie des pionnières pour s’être engagée dans le processus d’ouverture de ses lignes régionales à la concurrence.



23/12/2020 - Propos recueillis par

Jean-François Bélanger



Mobilités Magazine : quel est le poids du secteur des transports de voyageurs

dans la Région ? Philippe Tabarot : le budget des transports est le premier poste de dépense du conseil régional. Sur un montant annuel de 2,1 Mds€, il en représente environ le tiers. Et, sur ces 700 M€, c’est le contrat avec la SNCF qui en accapare l’essentiel, afin de faire rouler les quelques 500 trains du quotidien. Le reste se répartir surtout avec les liaisons interurbaines par autocars, une compétence que nous avons récupérée auprès des départements. ​ MM : quel objectif visez-vous à travers ces lourds moyens ? PT : la Région a déclaré prioritaire l’accessibilité des territoires ruraux et alpins. Par ailleurs, les métropoles et les grands centres urbains ont besoin de TER rapides et de grande capacité. Notre engagement est total pour proposer à nos concitoyens, et à ceux qui visitent notre territoire, un environnement préservé et qualitatif. Nous savons bien que le transport est le principal facteur d’émissions de gaz à effets de serre. C’est pour cela, et aussi pour respecter les limites européennes et le bien-être des populations, que nous multiplions les efforts pour proposer des transports décarbonés. Mais nous devons faire avec un réseau ferré dont le nombre de kilomètres par habitant est sans doute le plus faible d’Europe, et le plus souvent en mauvais état. ​ MM : aujourd’hui, quelle est la situation des transports ? PT : en matière d’exploitation, nous avons hérité d’une situation exécrable avec 15% de trains en retard et 10% de trains supprimés en début de mandat. Ce qui faisait de Sud-Provence-Alpes-Côte d’Azur, la pire Région au niveau du réseau national en la matière. Grâce au bras de fer que nous avons engagé avec la SNCF, nous sommes aujourd’hui arrivés à une situation meilleure, avec une régularité qui se situe désormais entre 90 et 92%. Même si elle reste encore perfectible. Le réseau TER est ainsi reparti de l’avant, avec une croissance moyenne de 10%, en affichant des scores particulièrement satisfaisants dans le domaine du nombre d’abonnés et des déplacements pendulaires. Ceci jusqu’à l’apparition de la crise sanitaire. MM : comment avez-vous géré cette crise sanitaire et quelles initiatives avez-vous pris pour la reprise ? PT : durant la période de confinement, nous avons choisi de conserver autour de 70 % de notre offre en semaine et de 60 % en week-end. Mais aujourd’hui, la population a peur et tarde à retrouver le chemin des transports en commun. Il convient de lutter par tous les moyens contre le grand retour de l’auto-solisme, tout en nous adaptant aux nouvelles conditions de déplacement générées par cette pandémie avec, notamment, l’instauration sans doute de manière prolongée et de plus en plus généralisée, du télétravail. C’est pour cela que nous avons lancé à la rentrée dernière, une tarification cousue main avec le « Pass Zou Télétravail », un l’abonnement pour 20 à 30 trajets à prix réduit, qui s’adapte à tous les cas. MM : le maritime peut-il être dans l’avenir une ressource supplémentaire pour désengorger le trafic routier ? PT : nous pensons davantage au maritime pour les transports de fret, pour les livraisons de colis... Pour le transport de voyageurs, il existe des initiatives entre Nice et Monaco et dans la rade de Toulon. Avant de nous engager, nous observons l’évolution du matériel susceptible de nous être proposé. ​ MM : concernant les lignes de desserte fine du territoire, quels sont vos objectifs ? PT : le président de la Région s’est clairement engagé sur ce dossier : aucune fermeture de ligne, ni de gare. Notre réseau comporte environ 500 kilomètres de lignes de desserte fine. Faute d’investissements suffisants par son gestionnaire durant les dernières décennies, de nombreuses lignes sont menacées de ralentissements, voire d’arrêts des circulations à moyen ou même à court terme. Aujourd’hui, trois chantiers mobilisent nos énergies : l’étoile de Veynes, vers Grenoble, Valence et Briançon, la Côte Bleue, entre Marseille et Miramas, et la ligne transfrontalière Nice-Tende, dont chacun a pris conscience de son intérêt à l’occasion de la tempête Alex et de la catastrophe de la vallée de la Roya. ​ MM : quels sont les chantiers prioritaires ? PT : la ligne Nice-Breil a été mise sous les projecteurs de l’actualité, tout comme celle transfrontalière Cuneo-Vintimille qui présente un enjeu de desserte européen. Sont aussi fléchées les lignes de l’étoile de Veyne vers Valence, Grenoble et Briançon ainsi que la ligne de la Côte Bleue, entre Miramas et Marseille. ​ MM : où en sont leurs financements ? PT : le montant des investissements nécessaires est estimé à 850 M€ auxquels il faudra ajouter une provision pour des aléas tels que ceux survenus dans la Vallée de la Roya en octobre dernier. Justement, pour la ligne Nice-Breil, en dehors des financements déjà acquis auprès de SNCF Réseau, nous sollicitons l’appui de l‘Union Européenne. Pour la ligne Cuneo-Vintimille, 50% devrait être pris en charge par l’Italie dans le cadre d’une convention entre les deux Etats. Pour la partie française, la répartition se fera à raison de 58,5% par l’Etat et SNCF Réseau, et 41,5% par la Région. Enfin, pour la Côte Bleue, l’Etat et SNCF Réseau, d’une part, et la Région, d’autre part, contribueront à hauteur de 35% sous réserve que la Métropole Aix-Marseille-Provence s’engage pour assurer le complément. MM : comment se passe le processus de mise en concurrence des lignes régionales ? PT : dès 2017, la Région a lancé un Appel à Manifestation d’Intérêt. Dix entreprises nationales et européennes ont répondu. Ensuite, en 2019, nous étions la première Région française à lancer l’avis européen de pré-information, première étape de la procédure d’ouverture à la concurrence des services publics. En ce début d’année, je ne vous dirais pas combien d’entreprises ont répondu, mais je peux assurer qu’il y aura, pour chacun des lots, plusieurs candidates. Donc nous aurons le choix. MM : quelles sont les lignes concernées par cette mise en concurrence PT : nous avons mis sur le marché deux lots à la concurrence : le premier concerne l’axe inter-métropole Marseille-Toulon-Nice. Il représente 10% de l’offre TER régionale. Ce contrat de concession d’une durée de 10 ans est estimé à 870 M€. Outre l’exploitation de la ligne, il prévoit la construction d’un centre de maintenance à Nice et aussi la fourniture de matériel roulant neuf. L’autre, le lot « Azur », concerne les lignes Les Arcs-Draguignan-Nice-Vintimille/Grasse-Cannes/Nice-Breil-Tende. Il représente 23% de l’offre régionale et est estimé à 1,5 Md€. Nous ferons le choix avant l’été et nous laisserons aux opérateurs retenus le soin de se préparer afin d’être fin prêt pour un début de leurs contrats d’exploitation à la fin de l’année 2014, pour le lot « Azur », et pour l’été 2025, pour l’axe inter-métropole. MM : sur quels critères seront effectués vos choix, sachant que la SNCF a confirmé qu’elle sera présente sur tous les dossiers ? PT : oui, il est vrai que le bras de fer que nous évoquions il y a un instant a plutôt fait réagir le transporteur national. Mais je peux vous assurer qu’elle n’aura pas à faire face à un choix unique comme cela s’est passé pour les lignes des Trains d’Equilibre du Territoire, entre Nantes et Bordeaux et Nantes et Lyon. Pour le choix que nous effectuerons, même si nous sommes respectueux de l’argent du contribuable, notre action sera guidée dans le sens d’une meilleure qualité de service, proposé au juste prix. MM : quelle est la vocation de la nouvelle ligne Marseille-Nice évoquée par le Conseil d’Orientation des Infrastructures? PT : la nouvelle ligne Provence-Côte d’Azur entre parfaitement dans l’objectif du report modal afin de soulager la ligne existante et apporter de nouvelles capacités sur un axe surchargé. Aujourd’hui, nous devons faire face à une saturation des réseaux, aussi bien routiers que ferroviaires. Cette ligne nouvelle répond à deux objectifs : nous devons tout d’abord dessaturer les nœuds ferroviaires de Marseille, Toulon et Nice afin d’améliorer la qualité des services du quotidien et augmenter les capacités. Parallèlement, nous adopterons le système européen de régulation du trafic ferroviaire (ERTMS), qui permet de densifier les flux. Ensuite, nous devons inscrire notre Région dans la construction de l’arc ferroviaire méditerranéen incluant l’Italie, la France et l’Espagne. MM : quels sont les échéances de ce projet et ses implication financières ? PT : Nous avons prévu deux phases. La première comprendra des quais supplémentaires à Marseille Saint-Charles, la réalisation de la gare TGV de Nice-Aéroports au niveau de la gare TER, et, dans le Var, des aménagements en vue du Réseau Express Métropolitain autour de Toulon… La phase deux prévoit la création d’une gare souterraine à Marseille Saint-Charles avec ses accès souterrains, et la création de voies supplémentaires à Cannes et à Nice... Des consultations publiques viennent de s’achever fin 2020. Quant à l’enquête d’Utilité Publique, elle doit être lancée cette année pour aboutir à une Déclaration d’Utilité Publique en 2023, avec un début des travaux et les premières livraisons à l’horizon 2027 pour la phase une. Pour la phase deux, nous tablons sur un horizon 2032. La phase une est estimée autour de 800 M€ et la phase deux se situerait plutôt autour de 1,2 Md€. MM : un accord international entre quatre réseaux nationaux est en cours pour les trains de nuit depuis la fin de l’année dernière. Qu’attendez-vous du Paris-Nice ? PT : il est constaté une appétence de la clientèle, en particulier des jeunes, pour le ferroviaire longue distance. Pour proposer une attractivité à ces services, il faudra disposer de moyens pour du matériel de qualité et il faudra aussi trouver des sillons disponibles pour que les horaires soient pratiques. MM : un mot, pour terminer, sur les mobilités douces qui ont fait leur entrée dans la Loi d’Orientation des Mobilités ? PT : incontestablement, la leçon que nous avons apprise à l’issu des épisodes de confinement c’est que le grand vainqueur en matière de déplacement, c’est le vélo. Nous accompagnons son essor en partenariat avec les métropoles et les communautés d’agglomération, comme pour l’ensemble des mobilités douces. Ainsi, nous avons lancé l’année dernière un plan vélo qui prévoit un investissement de 10 M€ pour doter la Région de 10 000 kilomètres de pistes cyclables d’ici à 2023, qu’elles soient urbaines, interurbaines, forestières... ​ ​


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