- Michel Chlastacz
Fret SNCF démantelé et ses concurrents « libres et non faussés » confortés
30/05/2023 - Le 23 mai 2023, Clément Beaune, ministre délégué aux Transports, a annoncé la réponse gouvernementale aux injonctions de la Commission européenne concernant les aides d’État accordées à Fret SNCF* et qui avaient été jugées par Bruxelles attentatoires à l’incontournable « concurrence libre et non faussée » (voir Mobilités Magazine, 26 mai 2023).

Une réponse en deux parties qui concernent respectivement Fret SNCF et l’ensemble du secteur ferroviaire fret.
Fret SNCF, qui devrait changer de dénomination et dont le capital est ouvert à d’autres participations que celle de l’État devrait conserver les activités dites du « wagon isolé » qui, regroupés dans les triages forment des trains réguliers multi-clients.
Mais Fret SNCF cédera à la concurrence les activités « trains complets » (dits désormais des « trains dédiés ») qui regroupent 30% des trafics et apportent 20% du chiffre d’affaires, et occupent 9% des 5300 salariés.
Le fret ferroviaire en général (ce qui subsiste de Fret SNCF est-il concerné ?) bénéficiera d’investissements et d’aides afin d’atteindre les 18% de part modale espérés pour le rail d’ici 2030 (10% aujourd’hui).
Côté investissements, ce ne sont pas moins de 4 Mds€ qui seront apportés à part égales en deux périodes (2023-2027 et 2027-2032). D’ici 2027, l’État apporterait 900 M€ au fret ferroviaire via les Régions dans le cadre des CPER, un apport qui devrait ici notamment bénéficier à la remise à niveau du réseau ferroviaire fret capillaire et à la création de plates-formes de fret locales. Le solde de ces investissements concernerait la modernisation des infrastructures fret nationales.
S’ajoute l’augmentation des aides annuelles à l’exploitation qui passeraient de 170 à 200 M€ entre 2023 et 2030.
Ces aides, initiées en 2021, se répartissent entre la prise en charge à hauteur de 50% des péages dus par les opérateurs de fret à SNCF Réseau (22,7%) plus des aides à l’exploitation du « wagon isolé » (41%), du transport combiné (27,5%) et des autoroutes ferroviaires (8,8%).
S’il semble évident que le Gouvernement a voulu agir très rapidement afin d’éviter des sanctions financières européennes, la question de fond demeure.
Dans un contexte où les impératifs climatiques et leur urgence absolue ponctuent systématiquement les discours politiques, on se trouve devant une véritable obstination idéologique de la Commission européenne.
Obstination d’un autre temps. Celui de la liquidation de Bristish Rail. Et également de son secteur fret ce qui avait laissé place à un monopole... privé !
* Ces aides visaient la liquidation de la partie de la dette de la SNCF considérée historiquement comme une dette de l’État. Aussi, elles ont été accordées à l‘ensemble du groupe holding SNCF donc y compris son entité Fret qui avant la réforme de 2018 était intégrée. Et trainait le boulet d’une dette de 5,3 Mds€.